Comment la psychologie environnementale peut-elle contribuer à la transition écologique?

Compte-rendu du séminaire présenté par Anne-Sophie Gousse-Lessard 


Anne-Sophie Gousse-Lessard est professeure associée à l’Institut des sciences de l’environnement de l’UQAM et chercheure dans ce domaine. Elle s’intéresse notamment à l’adaptation aux changements climatiques, à l’écocitoyenneté et à la mobilité durable. Le 5 février 2021, elle présentait un séminaire organisé par la Chaire de recherche sur la transition écologique de l’UQAM, portant sur la perspective et le rôle de la psychologie environnementale dans la transition écologique. Cette discipline permet, entre autres, d’étudier les comportements humains afin de développer des interventions pouvant faciliter l’engagement individuel et collectif dans la transformation écologique et sociale.  


Par Sandra Lachance

Qu’est-ce que la psychologie environnementale?  

La psychologie environnementale a pour objet d’étude les relations bidirectionnelles entre les êtres humains et leur environnement, qu’il soit bâti, social ou naturel. D’une part, cette discipline cherche à mieux comprendre comment l’environnement influence l’être humain. En effet, il est bien établi aujourd’hui que les milieux naturels exercent plusieurs bienfaits sur la santé des individus, particulièrement en diminuant le stress ainsi qu’en favorisant le bien-être et la satisfaction de vie (Houlden et al, 2018). D’autre part, la psychologie environnementale s’intéresse à l’influence de l’être humain sur son environnement. Cette partie de la discipline étudie principalement les caractéristiques individuelles et sociales qui influencent l’adoption de comportements visant à modifier l’environnement.   

Le rôle de la psychologie environnementale dans la transition écologique  

À l’aide de leurs travaux de recherche, les psychologues environnementaux utilisent leurs connaissances pour favoriser l’adaptation des individus aux changements climatiques et pour les encourager à s’impliquer dans la transition écologique, notamment par l’adoption de comportements pro-environnementaux.  Elles et ils travaillent donc régulièrement en partenariat avec plusieurs professionnel.les issu.es de différents secteurs (les décideuses et décideurs aux paliers gouvernementaux et municipaux, des urbanistes, des ingénieuses et ingénieurs, des sociologues, etc.). 

Anne-Sophie Gousse-Lessard mentionne qu’elle s’intéresse particulièrement aux leviers et aux freins des comportements pro-environnementaux. Un levier important serait le type de motivation qui sous-tend le comportement pro-environnemental. En effet, la théorie de l’autodétermination de Ryan et Deci (2000) stipule que des comportements basés sur des valeurs personnelles sont plus efficaces à long terme que des comportements dictés par des récompenses externes. Dans cette optique, les chercheurs et chercheuses en psychologie environnementale mettent sur pied des interventions axées sur le développement d’une motivation autodéterminée des individus. 

De plus, certains types de croyances favoriseraient l’adoption de comportements pro-environnementaux (Ajzen, 1985). Prenons en exemple une personne qui aime recycler, qui a l’impression qu’il est facile de le faire et dont l’entourage recycle : elle sera plus encline à adopter ce comportement pro-environnemental. En effet, l’identification des croyances de l’individu en lien avec un comportement souhaité permet de mieux cibler le type d’intervention à entreprendre. D’ailleurs, dans un modèle d’intervention par étapes, il existe plusieurs niveaux d’interventions (p. ex., sensibilisation, formation de l’intention comportementale, mise en action du comportement et intégration du comportement) (Bamberg, 2011 ; Pope, Pelletier et Guertin, 2018). 

Une motivation autodéterminée et des croyances appropriées suffisent-t-elles à l’adoption d’un comportement pro-environnemental? Il semblerait que non : même lorsque la personne a l’intention de produire un comportement, certains freins viennent parfois l’en empêcher. Par exemple, Gifford (2011) identifie sept barrières psychologiques qu’il appelle « les dragons de l’inaction ». Parmi celles-ci, le biais de l’optimisme (croire que les scientifiques vont sauver la planète) et l’impression de ne pas avoir de contrôle sur la situation (croire que seul le gouvernement a le pouvoir d’intervenir dans la crise environnementale) empêchent souvent les personnes de mettre en action leurs intentions comportementales.  

Selon la conférencière, ces barrières psychologiques seraient encouragées par la tendance en recherche à mettre sur les épaules des individus le poids du changement social. En effet, les interventions imaginées par les psychologues visent presqu’exclusivement à encourager des comportements individuels (p. ex., moins utiliser la voiture, recycler, moins consommer, etc.) alors que la transition écologique passe inévitablement par des changements qui sont, d’abord et avant tout, collectifs. 

« La majorité des études se sont intéressées aux comportements dans la sphère privée. […] Ce qu’on oublie souvent, ce sont les comportements qu’on peut faire dans la sphère publique, donc l’engagement politique des individus. […] Ça peut avoir un grand impact sur les décisions politiques, sur l’opinion publique, sur la création de mouvements de lutte, de résistance. » 

Anne-Sophie Gousse-Lessard en fait son cheval de bataille : même s’il est vrai que les individus ont un certain pouvoir d’action, ce sont surtout les gouvernements et les entreprises qu’il faut convaincre d’agir dans la lutte aux changements climatiques. Ceci peut être réalisé à l’aide de mouvements collectifs comme l’intégration identitaire de l’écocitoyenneté, un type de citoyenneté critique, créative et engagé dans les débats politiques ayant l’objectif de trouver des solutions aux enjeux environnementaux (Sauvé, 2014).  

Ce qu’il faut retenir…  

En somme, la psychologie environnementale est un domaine de recherche pouvant contribuer à une saine transition écologique en favorisant les comportements pro-environnementaux des individus mais, surtout, en les encourageant à s’impliquer collectivement dans la lutte aux changements climatiques. Si, comme moi, tu souhaites faire une différence en participant à l’innovation éco-sociale, n’attends plus! La Chaire de recherche UQAM sur la transition écologique propose une panoplie d’activités portant sur les enjeux environnementaux. Tu pourras, entre autres, visionner la conférence d’Anne-Sophie Gousse-Lessard autant de fois que tu le souhaites. Allez, viens, on est bien :  

Chaire de recherche UQAM sur la transition écologique


Bibliographie 

Articles de périodiques 

Ajzen, I. (1985). From intentions to actions: A theory of planned behavior. In Action control (pp. 11-39). Springer, Berlin, Heidelberg. 

Bamberg, M. (2011). Who am I? Narration and its contribution to self and identity. Theory & Psychology, 21(1), 3-24. 

Gifford, R. (2011). The dragons of inaction: psychological barriers that limit climate change mitigation and adaptation. American psychologist, 66(4), 290. 

Houlden, V., Weich, S., Porto de Albuquerque, J., Jarvis, S., & Rees, K. (2018). The relationship between greenspace and the mental wellbeing of adults: A systematic review. PloS one, 13(9), e0203000. 

Pope, J. P., Pelletier, L., & Guertin, C. (2018). Starting off on the best foot: a review of message framing and message tailoring, and recommendations for the comprehensive messaging strategy for sustained behavior change. Health communication, 33(9), 1068-1077. 

Ryan, R. M., & Deci, E. L. (2000). Self-determination theory and the facilitation of intrinsic motivation, social development, and well-being. American psychologist, 55(1), 68. 

Sauvé, L. (2014). Au cœur des questions socio-écologiques: des savoirs à construire, des compétences à développer. Éducation relative à l’environnement. Regards-Recherches-Réflexions, (Volume 11). 

Corrigé par Chloé SimardCamille Lavoie et Fannie Locat 

Révisé par Mélyna Langlois 

Photo par Marcus Spiske (@markusspiske)