Par Suzie Rousseau
Dernièrement, l’accès au doctorat en psychologie a fait beaucoup jaser dans les médias – où en sommes-nous, et qu’est-ce qui s’en vient en termes de changements possibles dans les prochaines années? Voici un résumé non exhaustif du Rapport David.
Contexte
En décembre 2022, Pascale Déry, ministre de l’Enseignement supérieur au gouvernement provincial du Québec, a annoncé qu’un groupe de travail présidé par Mme Hélène David, psychologue clinicienne (précédemment professeure de psychologie et ancienne ministre de l’Enseignement supérieur), serait mis sur pied pour fournir des recommandations en trois volets :
- Optimiser la formation universitaire pour accélérer l’obtention d’un permis de pratique par l’Ordre des psychologues du Québec;
- Optimiser la formation universitaire pour obtenir un permis de pratique en psychothérapie;
- Augmenter les compétences pratiques des bacheliers en psychologie et autres domaines connexes pour travailler dans le domaine de la santé mentale.
Les universités offrant des programmes reliés à la santé mentale et les associations professionnelles appropriées ont été consultées durant le développement du rapport1.
Résultats du Rapport David
Ce printemps, 18 recommandations ont été émises dans le Rapport du Groupe de travail sur l’optimisation de la formation en psychologie et en santé mentale, dont 10 concernant le premier volet. La première recommandation serait d’augmenter le nombre d’admission dans les programmes de Psy.D au sein des universités. Par contre, ceci n’est pas possible si d’autres mesures de support ne sont pas mises en place, telles que :
✔ Faire une évaluation du financement disponible pour les doctorats professionnels en psychologie et modifier les besoins;
✔ Mettre sur pied une enveloppe budgétaire réservée d’au moins quatre millions de dollars;
✔ Assurer que les doctorants ont suffisamment de psychologues-superviseurs durant leurs études;
✔ Développer un système de valorisation et de reconnaissance des psychologues- superviseurs dans le secteur public2.
D’autres recommandations incluent que les universités prennent des mesures pour que les étudiants complètent le Psy.D en quatre ans puisqu’il y a une grande disparité entre elles en termes d’années de complétion. Par exemple, les doctorants de l’UQAM complètent leur formation en sept ans, en comparaison à quatre ans pour les étudiants de l’Université de Montréal. Il est également recommandé que les montants des bourses soient augmentés à trente mille dollars par année. Les montants des bourses actuelles varient beaucoup, dépendamment du temps pris pour compléter le programme et du type de programme choisi. Par exemple, les étudiants au Psy.D ne sont généralement pas admissibles à plusieurs bourses contrairement aux étudiants du Ph.D. recherche-intervention3.
En ce qui concerne le deuxième volet, il est recommandé de mettre en place des programmes de premier cycle pour soutenir les membres des ordres professionnels souhaitant obtenir un permis d’exercice en psychothérapie. Il est également recommandé qu’une collaboration étroite soit mise en place entre l’Ordre des conseillers et des conseillères d’orientation et les universités pour les cours et stages afin d’obtenir les attestations appropriées4.
Finalement, trois recommandations concernent le dernier volet, soit:
✔ Mettre en œuvre un programme de soutien pour les étudiants au baccalauréat en psychologie qui ne feront pas de doctorat qui consisterait à offrir des avenues alternatives et emplois dans le domaine de la santé mentale.
✔ Mettre en œuvre des « cheminements passerelles » au baccalauréat qui permettrait aux étudiants en psychologie d’être admis à une maîtrise professionnelle connexe.
✔ Augmenter le programme de Reconfiguration de l’offre de formation à, au moins, quatre millions de dollars afin d’appuyer le développement de nouveaux profils universitaires5.
Considérations – Ce que ceci veut dire pour les étudiants en psychologie
Les programmes de baccalauréats et de doctorats vont possiblement être modifiés dans les prochaines années, dépendamment des recommandations retenues par les universités et le gouvernement du Québec – un suivi du plan d’implémentation peut être fait ici.
De plus, bien que ce rapport et un requestionnement sur les pratiques actuelles soient nécessaires, il y a un risque de confusion professionnelle à prendre en considération pour les changements proposés dans le baccalauréat de psychologie. Une limite de compétence des actes professionnels devra être clarifiée pour s’assurer que chaque professionnel ait des rôles et responsabilités clairs6.
L’enjeu n’est pas un manque de psychologues au Québec, mais bien un manque de psychologue dans le réseau public. Ajouter des places au doctorat sans ajouter des superviseurs dans le réseau public, ni promouvoir la profession dans ce même réseau n’aura pas le résultat escompté, soit celui d’arrêter l’exode des psychologues dans le secteur privé. Les offres du gouvernement en cours pour augmenter les salaires des psychologues dans le réseau public continuent d’avoir un écart de 44,3% avec le privé, et cet écart est aussi haut que 57% lorsque comparé avec les psychologues du réseau public de l’Ontario7. Des changements à cet égard sont également nécessaires pour l’optimisation des services en santé mentale.
Pour en apprendre plus
Je vous recommande fortement de lire le Rapport David dans vos temps libres. Que vous soyez en début ou en fin de parcours universitaire, le sujet est pertinent pour votre future occupation, quelle qu’elle soit dans le domaine de la santé mentale – bonne lecture!
Références
(1) Gouvernement du Québec (2023a, 6 avril). Santé mentale : des formations qui répondent aux besoins de la population. https://cdn-contenu.quebec.ca/cdn-contenu/adm/min/education/publications-adm/enseignement-superieur/bourses-internat/rapport-psychologie-sante-mentale.pdf
(2) Ibid
(3) Ibid
(4) Ibid
(5) Ibid
(6) Ordre des psychologues du Québec (2023, juin). Groupe de travail présidé par Hélène David – Résultats du sondage de l’Ordre. https://www.ordrepsy.qc.ca/-/groupe-travail-helene-david-resultats-sondage-ordre
(7) Ibid
Corrigé par Anne-Marie Parenteau, Megan Racine et Ariane Pomerleau
Révisé par Florence Grenier
Illustration originale par Laurie-Anne Vidori
